Le caractère déterminant du choix d’une marque
Une marque exprime clairement l’identité d’une entreprise et sert à véhiculer son image. Son choix apparaît donc déterminant. Elle peut, dans certains cas, revêtir une importance considérable, en faisant directement référence à la gamme de produits proposés par l’enseigne. Ainsi, l’entreprise MacDonalds a choisi de reprendre la sonorité "Mac" pour l’ensemble de sa gamme de produits, dont tous les intitulés constituent d’ailleurs des marques déposées.
Sur Internet, le choix d’un nom de marque pertinent est d’autant plus important qu’il favorisera le référencement sur les moteurs de recherche. Ne bénéficiant pas de la renommée d’une grande enseigne, les commerçants désireux de se lancer sur la Toile seront invités à rechercher, à titre de marque, un nom facile à retenir et contenant, idéalement, des mots clés faisant l’objet de nombreuses requêtes.
A ce stade, certains individus peu scrupuleux peuvent être tentés d’opter pour un nom de marque volontairement proche de l’un de ceux déjà existants, dans le but de tromper la vigilance des visiteurs et profiter de la notoriété des titulaires de la marque empruntée. Peut en résulter, pour ce dernier, la perte d’une partie du trafic de son site web en faveur des nouveaux arrivants. Cette pratique, totalement interdite, est désignée sous le nom de parasitisme.
La sanction civile du parasitisme
Dans un arrêt en date du 25 mars 2014, la Cour de cassation a pu rappeler que l’action en contrefaçon était ouverte en cas d’utilisation abusive d’une marque volontairement similaire, mais non-identique, à l’une de celles déjà déposées antérieurement.
L’action en contrefaçon est ouverte à la victime sur le fondement de l’article L713-3 du Code de la propriété intellectuelle, en vertu duquel :
« Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public (…) l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. »
Encore faut-il que le titulaire de la marque contrefaite prouve un tel risque de confusion. A cet égard, la Cour de cassation adopte une appréciation stricte de la situation, considérant que la circonstance selon laquelle les deux marques à comparer sont sensiblement différentes l’une de l’autre est inopérante, dès lors que leurs ressemblances sont notables.
Ainsi, dans le cadre du litige tranché le 25 mars 2014, les juges du fond avaient pris le parti de rejeter l’action en contrefaçon intentée par la société « Lézard Graphique » à l’encontre de la société « Studio Lézard Graphique », qui avait choisi de réserver sur Internet les noms de domaine "lézard-graphique.com" et "studio-lézard.com". Pour les juges du fond, en effet, aucun risque de confusion n’était susceptible de survenir entre les deux marques, aux yeux du public, dès lors que la nouvelle société avait ajouté le terme "Studio" à sa marque, et s’était démarqué par un logo distinct.
Pour la Cour de cassation, les juges du fond n’auraient pas dû fonder leur décision sur la seule constatation de différences entre les deux marques, mais auraient dû apprécier le risque de confusion dans sa globalité, donc en tenant compte des ressemblances qui pouvaient, en l’espèce, être observées. A cet égard, la proximité entre les deux activités exercées peut notamment apparaître déterminante. Ainsi, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé, dès 1997, que le parasitisme devait s’apprécier en prenant en compte « l’impression d’ensemble » produite par les marques en cause sur le consommateur. Notamment, un :
« ... faible degré de similitude entre les produits ou services désignés [pouvait] être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement ».
CJCE, 29 septembre 1998, Canon Kabushiki Kaisha c/ Metro-Goldwyn-Mayer
Il reviendra donc au juge saisi d’une action en contrefaçon pour parasitisme de dresser l’état de toutes les ressemblances pouvant exister entre les deux enseignes et déterminer souverainement si, malgré les divergences susceptibles d’être relevées, le risque de confusion à l’égard du consommateur moyen est réel ou non.