Alors que les taux d’intérêts des prêts bancaires sont de plus en plus élevés, les prêts entre particuliers deviennent de plus en plus attractifs ; ce type de prêts présente l’avantage d’offrir un taux d’intérêt très faible, voire presque nul parfois. Toutefois, si le prêt d’argent à un proche, une connaissance ou encore un ami semble être séduisant, certaines précautions doivent être prises afin d’éviter les éventuels désagréments.
Avant de s’engager, il est cependant nécessaire de connaitre les quelques règles à respecter pour contracter en toute sécurité. On vous explique tout ça !
Qu’est-ce qu’un prêt entre particuliers ?
Le prêt entre particuliers est avant tout un contrat, faisant naître entre les parties contractantes des obligations. Il se définit comme un prêt d’argent, conclu entre 2 personnes physiques ou morales, sans utiliser l’intermédiaire d’un établissement de crédit ou d’une banque.
Il est en effet possible, pour n’importe quelle personne, de consentir à une autre personne un prêt à des conditions qu’elles auront toutes deux conjointement définies. L’usage pour lequel le prêt est employé importe peu : il peut par exemple s’agir pour le contractant de financer un projet personnel (travaux, achat, …), ou alors de répondre à un besoin urgent de trésorerie.
Le prêt peut être conclu en « direct », ou via des plateformes spécialement prévues à cet effet ; on parle alors de plateformes de crowdfunding ou de financement participatif, mettant en relation des particuliers prêteurs avec des particuliers emprunteurs.
Le fonctionnement du contrat de prĂŞt entre particuliers
Le fonctionnement d’un contrat de prêt entre particuliers reste assez simple. La principale règle c’est que le particulier prêteur s’engage à prêter de l’argent au particulier emprunteur qui, quant à lui, s’engage à le lui restituer.
Les contractants doivent donc s’accorder sur les conditions du prêt, ainsi que sur la forme du contrat qu’ils souhaitent adopter. Ce type de contrat leur permet d’éviter le passage par le système bancaire qui impose certaines conditions aux particuliers contractants, pouvant parfois exclure de potentiels emprunteurs avec des profils financiers particuliers. C’est l’une des raisons principales pour laquelle s’est considérablement développé depuis quelques années le prêt entre particuliers.
Le contrat de prêt entre particuliers fait naître entre le prêteur et l’emprunteur une relation contractuelle, faisant naître entre eux des obligations réciproques :
- Le prêteur est astreint envers son contractant à lui verser la somme d’argent promise.
- L’emprunteur, sera quant à lui astreint à rembourser au prêteur la somme que celui-ci lui a remise.
Les éléments à prendre en compte lors de la conclusion d’un contrat de prêt entre particuliers
La loi prévoit que le prêteur demeure propriétaire de la somme qu’il prête à l’emprunteur pendant toute la durée du prêt. Ainsi, à l’échéance du prêt, l’emprunteur est astreint au remboursement de la totalité de la somme prêtée.
Il est fortement recommandé aux parties de formaliser par écrit leur engagement. Cet écrit leur permettra de se constituer une preuve pour, d’une part, la remise des fonds, objet principal du contrat, et d’autre part, faciliter le recouvrement auprès de l’emprunteur en cas de litige.
Les parties ont le choix de formaliser ou non le prêt dans un écrit. Si elles décident toute fois d’en faire un, celui-ci peut prendre deux formes différentes :
- Par un contrat de prêt, que l’on peut qualifier comme étant « classique », signé par les deux parties au contrat (prêteur et emprunteur) ; il peut s’agir d’un acte authentique ou d’un acte sous signature privée.
- Par une reconnaissance de dette, signée dans ce cas par le seul emprunteur.
Dans les deux cas, l’écrit devra être produit en deux exemplaires, chacune des parties se devant d’en conserver un. Deux situations sont à distinguer :
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Lorsque le montant du prêt est inférieur à 1 500€
La preuve par écrit n’est pas obligatoire mais reste vivement conseillée aux parties. L’absence d’un acte écrit, en cas de défaut de remboursement de l’emprunteur, rendra l’action en justice presque impossible pour le prêteur (absence de preuves matérielles du prêt, qui pourra alors être assimilé à un
don). -
Lorsque le montant du prêt est supérieur à 1 500€
Un écrit est imposé par la loi pour matérialiser l’engagement des parties. Cet écrit peut prendre la forme d’un acte sous signature privée, ou bien d’un acte authentique. L’exigence d’un tel écrit permet d’attester de la volonté de l’emprunteur de rembourser son prêteur.
Il est cependant suggéré aux parties de s’engager via un acte authentique dès lors que le prêt porte sur des sommes importantes. Lorsqu’elles s’engagent par acte sous signature privée, il est possible de le faire enregistrer auprès du service d’enregistrement de l’administration fiscale ; cette formalité comporte toutefois un coût, mais permet de donner d’acte certaine à l’acte en cas de litige.
Si les parties décident de passer leur engagement via une reconnaissance de dette, l’acte peut être rédigé sur papier libre ; elle devra comporter la date et la signature de l’emprunteur. L’original de la reconnaissance de dette doit être impérativement conservé par le prêteur, l’emprunteur n’en conservant qu’une copie.
Si les parties décident de s’engager via une plateforme de financement participatif, il est important de vérifier que celle-ci est immatriculée auprès de l’ORIAS (Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance) en tant qu’intermédiaire en financement participatif. La plateforme doit en outre avoir reçu un agrément bancaire de l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution). Les parties contractantes se doivent donc de rester prudentes lors du choix de plateforme avec laquelle elles décident de s’engager et de vérifier l’habilitation de celle-ci.
Il est important de préciser que le contrat de prêt entre particulier n’est pas soumis aux dispositions prévues par le code de la consommation ; aussi, les parties ne disposent d’aucun délai de rétractation.
Pourquoi rédiger un contrat de prêt entre particuliers ?
Au vu des obligations réciproques nées entre les parties, il est fortement conseillé de formaliser ce prêt entre particuliers par un écrit ; celui-ci permet de reconnaître la dette qu’a le particulier emprunteur envers le particulier prêteur. Ainsi, en cas de mauvaise foi lors du remboursement, cela permet de faciliter la mise en oeuvre d’une procédure judiciaire par le prêteur. Il est donc important pour le prêteur, lorsqu’est conclu le contrat, de prendre certaines garanties auprès de l’emprunteur : carte d’identité, adresse du domicile, fiche de paie, …
Il est en outre possible, de relever quelques avantages à la rédaction d’un contrat de prêt entre les parties :
- Le prêt entre particuliers à l’avantage de permettre aux parties de définir librement les modalités du prêt entre le prêteur et l’emprunteur.
- Souvent, ce type de contrat peut être une bonne alternative lorsque le profil du particulier emprunteur est considéré comme trop risqué par les établissements de crédit. C’est en effet souvent le cas pour les jeunes emprunteurs qui ne possèdent pas encore toutes les garanties suffisantes aux yeux des établissements de crédit, et qui peuvent cependant être considérés comme solvables.
- Pour le prêteur, il est parfois plus avantageux pour lui de conclure un contrat de prêt entre particuliers, les taux d’intérêts étant souvent plus élevés, et donc de facto plus intéressants, que les taux d’intérêts d’autres produits financiers tels que les assurances-vie ou encore les livrets d’épargne.
Il est fortement recommandé aux parties de prévoir dans leur engagement contractuel une clause prévoyant la résiliation du prêt en cas de manquement de diligence de l’emprunteur dans le remboursement.
Doit-on déclarer un prêt entre particuliers ?
La déclaration du prêt conclu entre les parties auprès de l’administration fiscale dépend de la somme de celui-ci.
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Lorsque le prêt conclu ne dépasse pas 760 euros
Lorsque le prêt conclu (ou le cumul de plusieurs prêts) entre les parties dépasse la somme de 760 euros, l’emprunteur est obligé de déclarer fiscalement son prêt ; dans ce cas, il importe peu que le prêt soit accordé avec ou sans intérêts. En revanche, le prêteur n’est quant à lui soumis à aucune obligation déclarative auprès de l’administration fiscale. Toutefois, les intérêts perçus par le prêteur devront obligatoirement être mentionnés dans sa déclaration de revenu ; en cas d’omission, l’administration fiscale se réserve le droit de taxer les intérêts perçus par le prêteur comme un revenu d’origine indéterminée. -
Lorsque le prêt conclu dépasse 5 000 euros
Cependant, une déclaration auprès du service des impôts et de l’administration fiscale devra obligatoirement être faite en même temps que la déclaration de revenus, dès lors que le prêt excède un montant de 5 000 euros. Cette déclaration doit être faite par les deux parties contractantes, le prêteur et l’emprunteur ; celle-ci se réalise par le biais d’un formulaire Cerfa (Cerfa n° 2062) devant être joint à la déclaration de revenus des deux parties contractantes. Dans ce cas, le prêt sera alors déduit du patrimoine imposable de l’emprunteur.
Les éléments contenus dans le contrat de prêt entre particuliers
Il est facilement possible de trouver des exemples/modèles de contrats de prêt entre particuliers ou de reconnaissance de dette sur internet, permettant aux parties qui s’engagent de formaliser leur accord. De nombreux modèles sont disponibles et facilement téléchargeables sur internet.
Attention toutefois, ceux-ci peuvent se révéler inadaptés à vos besoins et votre situation ; il vous est ainsi vivement recommandé de déléguer la tâche de la rédaction de tels contrats à des experts dans ce domaine.
Le contrat de prêt entre particuliers ou la reconnaissance de dette, afin d’apporter toutes les garanties suffisantes, doit préciser :
- L’identification des parties : nom, prénom et adresse
- L’objet du contrat
- Le montant emprunté
- La durée du prêt
- Le montant et la fréquence des remboursements
- Le taux d'intérêt éventuel (description précise des intérêts)
- La date
- La signature des deux parties contractantes (prĂŞteur et emprunteur)
Il est nécessaire de préciser que lorsque l’acte est une reconnaissance de dette, celui-ci doit mentionner en chiffres et en lettres le montant auquel l’emprunteur s’engage.
L’intitulé du contrat importe peu ; qu’il soit indiqué « prêt » ou « reconnaissance de dette », l’acte se doit de contenir l’engagement de l’emprunteur pour la restitution des fonds, avec la précision du montant. Cet engagement doit obligatoirement se matérialiser par la signature de l’emprunteur.
Afin de garantir au prêteur un remboursement en temps et en heure, il peut être judicieux de prévoir d’éventuelles pénalités de retard. Il sera également tout à fait possible de demander à l’emprunteur de fournir une caution ; cette dernière permet au prêteur de détenir une garantie supplémentaire au remboursement en cas de défaillance de la part de l’emprunteur. En outre, instaurer un calendrier pour le remboursement, permet de prévoir exactement, dès la signature, la durée du contrat de prêt entre particuliers et l’échéance pour le remboursement.
Il est important pour les parties de retenir que l’écrit est essentiel pour démontrer leur volonté de s’engager. La principale difficulté en cas d’absence de contrat réside dans le fait pour le prêteur de prouver le prêt.
Il sera nécessaire de faire apparaitre dans l’acte plusieurs informations concernant notamment le rédacteur de l’acte, les parties à celui-ci ainsi que celles relatives à son objet.
En cas de défaut de remboursement de l’emprunteur
La charge de la preuve du prêt entre particuliers incombe au prêteur ; il lui revient de prouver qu’il a prêté la somme à l’emprunteur.
Par principe, le code civil (article 1359 du code civil) impose que la preuve d’un prêt entre particuliers soit rapportée par écrit lorsqu’il porte sur un montant supérieur à 1 500 euros.
Toutefois, certaines exceptions permettent au prêteur d’intenter une action en justice, même en l’absence d’écrit :
- Lorsque le prêteur dispose d’un ou plusieurs commencements de preuve par écrit ; sont considérés comme des commencements de preuve par écrit, une reconnaissance de dette imparfaite mais signée, un échange de courriers mentionnant l’existence du prêt, …
- Lorsque l’emprunteur est dans l’impossibilité morale d’exiger une reconnaissance de dette écrite ; c’est le cas par exemple lorsque l’emprunteur est un membre de la famille ou un proche.
- Lorsque le prêteur a perdu la reconnaissance de dette écrite en raison d’une circonstance indépendante de sa volonté (cas de force majeure). Le prêteur devra démontrer l’existence d’un cas de force majeur (3 éléments sont à prouver : extranéité, imprévisibilité et irrésistibilité de la circonstance).
- Lorsque le prêteur n’a pas conservé la reconnaissance de dette écrite mais en possède une copie « fidèle ».
Dans ces différents cas, le prêteur pourra prétendre à une action en justice en s’appuyant sur les éléments dont il dispose. Le juge devra alors déterminer si les éléments apportés sont suffisants pour démontrer l’existence du prêt.
L’engagement de l’emprunteur se matérialisant par la signature du contrat de prêt, le prêteur devra prouver la sincérité de celle-ci en cas de contestation par l’emprunteur.
En cas de contestation, le prêteur devra démontrer qu’il a bien effectué la remise des fonds à l’emprunteur.
Cette preuve peut être faite par tout moyen : remise de chèque, virement, … Attention, la Cour de cassation a jugé, de la première chambre civile du 14 janvier 2010 (n°08-18.581), que la reconnaissance de dette établie et signée par l’emprunteur vaut preuve de la remise des fonds par le prêteur à l’emprunteur.
Ainsi, lorsque le prêteur saisit la justice dans le souhait de réclamer la restitution des fonds prêtés, il devra obligatoirement apporter la preuve de la remise des fonds, et, de la conclusion du contrat de prêt entre particuliers. En conclusion, pour démontrer sa bonne foi et obtenir gain de cause envers l’emprunteur récalcitrant, le préteur est soumis à 2 obligations :
- Justifier de la remise des fonds ; la preuve peut ĂŞtre faite par tout moyen.
- Démontrer l’existence d’un contrat de prêt conclu avec l’emprunteur.
La seule démonstration d’une remise des fonds n’atteste pas l’existence du prêt ; en effet, l’absence de contrat peut alors faire passer le prêt sous la forme d’un don envers l’emprunteur.
L’écrit est donc essentiel, puisque permettant de démontrer l’existence du prêt entre particuliers conclu par les parties : preuve de la date d’échéance pour le remboursement, du montant du prêt, des éventuels intérêts, …
Il faut toutefois préciser que le prêteur qui souhaite obtenir en justice le remboursement de son prêt devra nécessairement attendre le terme du contrat avant d’intenter une quelconque action. La demande de remboursement se prescrit par 5 ans ; le prêteur ne doit donc pas trop attendre pour faire la demande de remboursement en justice, sous peine de se voir opposer une fin de non-recevoir à son action.
Afin que l’action du prêteur soit considérée comme recevable, celui-ci devra avoir, au préalable, mis en demeure l’emprunteur d’effectuer le remboursement. A défaut d’exécution de sa part, le prêteur pourra alors intenter le recouvrement en justice.