La valeur marchande du site internet
Un site internet est constitué par de nombreux éléments. Les éléments essentiels sont le nom de domaine (l’adresse du site), son contenu et son hébergement. Mais on peut rajouter à ces éléments la base de données du site, son fichier client, etc.
Le site internet est un ensemble de pages web liées les unes aux autres et mises en ligne à destination d’un public plus ou moins restreint.
Le site internet est donc un actif immatériel c'est-à -dire un élément qui n’a pas véritablement de substance physique, même si l’hébergement nécessite des éléments physiques (un serveur, un espace mémoire).
Il est cependant parfaitement possible d’évaluer la valeur marchande d’un site internet, en fonction de son contenu, de son trafic (c'est-à -dire le nombre de ses visiteurs), de son chiffre d’affaires, de son référencement, etc.
De plus, un site internet permettra parfois une activité commerciale à travers une activité de vente, en proposant une prestation de service, en communicant sur les activités d’une entreprise et plus encore.
La cession d’un site internet
Un site internet, bien qu’immatériel, peut être vendu ou cédé. Le contrat de vente est soumis aux règles applicables au contrat de vente en général, dont disposent les articles 1582 et suivants du Code civil. Sauf dans le cas où la vente du site internet correspond à la vente d’un fonds de commerce comme nous allons le voir.
Le contrat de vente a pour éléments caractéristiques d’énoncer l’objet vendu (le site internet), de fixer le prix, et engendre le transfert immédiat de propriété (sauf si les parties en disposent autrement) depuis le vendeur vers l’acheteur.
La vente d'un site internet est un acte comportant d’importants risques juridiques et qui donc nécessite la rédaction d'un contrat (bien que l’écrit ne soit pas obligatoire). Outre le fait que ce dernier permettra d'écarter la nullité de la vente, il présente l'intérêt d'éviter, sinon de diminuer, tout litige entre les parties.
Le respect du droit d’auteur
Une des spécificités du site internet, c’est d’avoir un contenu. Il faudra donc être très vigilant lors de la vente, de respecter les dispositions protégeant le droit d’auteur.
Ces dispositions se trouvent dans le Code de la propriété intellectuelle (articles L131-1 et suivants).
En effet, le non-respect de certaines de ces dispositions pourra conduire à la nullité de l’acte de vente. Aussi, avant d’acheter ou de céder un site internet, il est primordial de s’assurer que les droits d’auteur appartiennent bien à celui qui s’en prévaut, et que leur transfert est réalisable.
Clauses particulières
Le principe en droit français étant celui du consensualisme, les cocontractants pourront inclure diverses clauses dans leur contrat, sous réserve que celles-ci ne soient pas abusives.
La loi du 1er février 1995, concernant les clauses abusives, dispose qu'il s'agit de clauses qui créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties dans un contrat entre un professionnel et un non-professionnel. Elles sont réputées non-écrites : le contrat reste valable mais sera interprété comme si ces clauses n’y avaient jamais été insérées.
Parmi les clauses particulières que ce contrat pourra contenir, on pourra trouver des clauses de non-concurrence, des clauses de garantie (en plus de la garantie légale dont dispose les articles 1625 et suivants du Code civil, le vendeur peut offrir à l’acheteur une garantie contractuelle).
Ces clauses sont libres, elles pourront aborder des détails pratiques, comme le transfert du nom de domaine ou de l’hébergement, l’utilisation des adresses emails, etc.
Dans cette transaction, il faudra aussi s’assurer que les formalités fiscales qui s’appliquent à ce type de cession sont respectées.
Evaluer le site internet
Evaluer la valeur d’un site internet est un exercice à haut risque. En effet, internet est un outil très réactif, les choses y changent vite et évaluer un site est donc périlleux.
Généralement, lorsqu’on évalue un fonds de commerce (si le site internet en est un), on étudie le chiffre d’affaires sur les dernières années, et son potentiel pour les années futures. Cependant, internet est plus réactif qu’un marché normal, aussi cette méthode atteint-elle rapidement ses limites. La même méthode s’applique à partir des bénéfices réalisés par le site internet, avec les mêmes limites.
Quant à un site web en général, sa valeur se jugera à son contenu (dans le respect du droit d’auteur). On pourra aussi prendre en compte d’autres éléments, comme l’auteur du site, la navigation, le nom de domaine, le contenu publicitaire du site, son trafic, son graphisme, son potentiel de vente, sa sécurité, sa gestion ou encore, son administration.
Quoiqu’il en soit, il faut toujours se rappeler qu’un site internet peut dépérir très rapidement, ou gagner très vite en trafic. Aussi son contenu, sa clientèle, sa capacité à évoluer seront des éléments à prendre en compte. Les bénéfices et le chiffre d’affaires seront à eux seuls bien souvent insuffisants pour juger de la valeur du site.
Le site internet, un fonds de commerce ?
Dans le cas d’un site marchand, il arrivera que le site internet ne puisse être vendu par un simple contrat de vente, si ce site peut être considéré comme un fonds de commerce. Cela se justifie car par exemple, certaines entreprises ne fonctionnent que par leur commerce sur internet.
Dans de tels cas, la vente du site internet revient à la vente du fonds de commerce. La vente du fonds de commerce sera un contrat plus difficile à réaliser que la vente d’un simple site internet. Il faudra faire appel à un professionnel du droit pour réaliser une telle cession très réglementée.
Pour qu’un site soit considéré comme un fonds de commerce, il faut qu’il réunisse trois éléments :
- Tout d’abord, il doit posséder une clientèle (Cour de Cassation, chambre commerciale, 16 janvier 1990, JCP 1991 II, 21662). C’est une condition absolument nécessaire pour considérer l’existence d’un fonds de commerce.
- Ensuite, cette clientèle doit être spécifique et se distinguer du reste de l’entreprise (Cour de cassation, chambre commerciale, 23 mai 1960, Bull. civ. III, n°192). La jurisprudence a déjà pu reconnaitre à un site internet une telle clientèle, voir Cour d’Appel de Paris, 4e chambre, Section B, Yves Casse contre Ebay Inc, 9 novembre 2007.
- Enfin, le site doit être indépendant. Selon la jurisprudence, un site est indépendant lorsqu’il se positionne sur « un marché distinct » (Cour d’Appel de Paris, 14e chambre, Section B, Fnac & Fnac contre Rue du Commerce, 23 juin 2006).
Les spécificités de la cession du fonds de commerce
Lorsqu’il s’agira de céder un fonds de commerce, les formalités pourront être assez lourdes. Entre autres, l’acte de vente, pour ne pas être considéré comme nul, devra contenir certaines informations spécifiques (dont disposent les articles L141-1 et suivants du Code de commerce) telles l’origine du fonds, son prix d’acquisition, l’état des privilèges et nantissement grevant le fonds, son chiffre d’affaires durant les trois derniers exercices comptables, ses bénéfices commerciaux et plus encore.
De plus, il faudra alors régler la situation des salariés, qui sont en principe transférés à l’acheteur tel que le dispose le Code du travail. Les cocontractants devront aussi payer diverses taxes et ne pas oublier de se conformer aux formalités prévues dans le Code général des impôts.
Que mettre dans le contrat ?
Que mettre dans le contrat de vente du site web ? Voici un énoncé d’éléments auxquels on pourra penser. Le contrat devra d’abord désigner les parties, il pourra comprendre un préambule et un paragraphe de définitions. L’objet du contrat devra y être défini, ainsi que la description des éléments du site et des droits cédés. On pourra ensuite y traiter des modalités de l’exploitation du site et de la cession des éléments physiques du site. Si une documentation existe sa remise pourra y être discutée. Les notions de temps dans le transfert de propriété pourront être insérées dans le contrat si besoin est.
De plus, il faudra préciser le champ d’application territorial de la cession. Sera aussi traité de la question des clauses d’exclusivité ou des clauses pénales ainsi que des conditions financières de la transaction. Le transfert du nom de domaine pourra y être discuté. Une garantie contractuelle ainsi qu’une clause de non-concurrence pourront être comprises dans le contrat si besoin est. Enfin, le contrat pourra préciser les questions de confidentialité, de modification du contrat, de la divisibilité des clauses, du droit applicable (et de la langue du contrat), du règlement de potentiels différends à venir, des formalités de transfert, des frais de cession. Et bien sûr, le contrat devra contenir la signature des deux parties, obtenue par un consentement libre et éclairé (absent de vice).